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Lettre ouverte.
mercredi 24 mars 2010, par
C’est parce qu’il a été arrêté par le même policier avant et après l’indépendance que Mohamed Boudiaf s’est posé la question : où va l’Algérie ? Une Question qui reste d’une brûlante actualité.
Lettre ouverte.
Objet : Où va l’Algérie ?
En effet, où va l’Algérie avec son « école sinistrée » et ses écoliers complètement perturbés. Son corps enseignant est tragiquement déchiré. Il ne se fait même pas respecter par ses propres élèves. Aussi, il est malheureusement maltraité par l’Administration et déconsidéré par la société tout entière. Comment avons-nous perdu la haute image et la profonde crainte que nous avions de nos Maîtres d’école. Les Enseignants et les surveillants d’aujourd’hui ne peuvent plus punir les cancres et les enfants mal éduqués à cause de l’impunité érigée en système.
Où avons-nous enterré les valeurs de nos grands-mères qui n’ont jamais été à l’école mais qui ont pu donner à l’Algérie des hommes comme Boudiaf, Ben Boulaid, Ben M’hidi, Krim, Abbas, Ben Badis et beaucoup d’autres encore.
L’EDUCATION : voilà l’origine de notre mal qui remonte à l’Indépendance confisquée, où après avoir eu la chance d’être dirigé par Ferhat Abbas et Youcef Benkhedda, deux Pharmaciens désignés à la tête du gouvernement provisoire algérien, le pays a été séquestré et confié à qui vous savez. Où pouvait bien aller notre Algérie avec « Une Constitution élaborée dans un cinéma ? », se demandait tristement Ferhat Abbas.
Où va l’Algérie avec sa santé complètement malade ? Avec ses médecins qui se font matraquer en 2010, qui rentrent chez eux blessés physiquement et surtout moralement alors que dans les autres pays, ce sont les médecins qui pansent les plaies et guérissent les maux physiques et psychologiques du peuple.
Où va l’Algérie avec l’injustice généralisée contre le peuple algérien. Un peuple qui a subi une guerre de sept ans et demi, en y sacrifiant un million et demi de martyres, parce qu’il n’a pas admis les crimes et l’injustice du colonialisme. Ce sont ces crimes et cette injustice du colonialisme qui ont créé chez l’Algérien une inextinguible soif de justice. Ainsi, comme le dit Jules Renard : « Si tu as soif de justice, tu auras toujours soif ».
Mais cette soif de justice, le peuple algérien doit l’étancher comme un peuple civilisé, c’est-à-dire, en laissant la justice faire son travail. Il faut donc lever toutes les pressions politiques sur la justice pour la laisser marcher toute seule car il n’y a que l’injustice qui a besoin de béquilles.
Où va l’Algérie avec ses lois qui imposent des amendes à un piéton parce qu’il traverse mal une rue tout en laissant ceux qui détournent des fonds faramineux courir librement.
Où va l’Algérie avec un Ministre dont le Chef de Cabinet et le Secrétaire Général de son Ministère sont écroués depuis des mois pour des affaires de corruption et qui aurait dit : « Je suis là et les autres aboient ». Qui sont-ils les autres ?
Où va l’Algérie avec ce Ministre, expert des questions énergétiques internationales, mais qui fait semblant de ne pas savoir ce qui se passe dans la plus importante Entreprise du pays et qui est sous sa tutelle directe.
Où va l’Algérie qui ne pense plus, ne fait que vendre son pétrole, son gaz, et ses multiples richesses. Où va l’Algérie qui produit ce qu’elle ne consomme pas et consomme ce qu’elle ne produit pas.
Où va l’Algérie quand les mères et les grands-mères sont jetées dans les « Diar El Adjaza ». Où va l’Algérie qui ne fait qu’écraser les maillons faibles chez nous : la Femme et l’Enfant.
Où va l’Algérie qui a transformé sa jeunesse, tour à tour, en « hitistes », terroristes et puis harragas. Où va l’Algérie avec cette mauvaise volonté qui caractérise notre administration nationale et locale, et qui, comme le dit Goethe, ne fait qu’ « Ecraser l’innocent qui résiste, (car) c’est le moyen que les tyrans emploient pour se faire place en mainte circonstance. »
Où va l’Algérie avec ses autoroutes bloquées par des barrages de police et de gendarmerie alors que l’Etat y a investi des milliards pour permettre au peuple algérien de circuler chez lui comme on circule sur les autoroutes ailleurs.
Où va l’Algérie avec les Partis politiques qui se taisent complètement quand le pays traverse des moments difficiles comme ceux que nous avons vécus ces dernières semaines.
Des Partis qui donnent la nette impression qu’ils ne sont là que pour puiser, eux aussi, dans le Trésor du peuple pour mener des « campagnes électorales » afin de placer aux Assemblées leurs députés qui ne proposent même pas une seule loi durant toute une session.
Où va l’Algérie avec ses maisons et appartements barricadés de fer et d’acier et qui expriment la désolation et la peur dans lesquelles est plongé le peuple.
En nous posant la question : « où va l’Algérie ? », nous nous interrogeons sur le sacrifice suprême de nos pères face à l’ennemi d’hier….
L’Algérie n’ira nulle part si les parents rejettent leur responsabilité sur la seule école. Il nous faut dire nos vérités ; l’Ecole instruit mais n’éduque pas. Ce sont les parents qui éduquent pendant six ans avant de livrer leurs enfants à l’école où il y a beaucoup d’enfants éduqués mais malheureusement aussi beaucoup d’enfants sont mal éduqués et devant lesquels l’école est désarmée parce que ce sont leurs parents eux-mêmes qui sont mal éduqués et que le système a corrompus pour en faire ses « nouveaux riches » qui ne sont pas nobles. Sans noblesse la richesse est éphémère, car la vraie richesse c’est l’éducation qui ne s’achète pas quelque soit la richesse.
L’Algérie n’ira nulle part si elle continue à animer la vie politique avec des Partis « clés en mains ». Seule une réelle renaissance exprimée dans la pleine sérénité sur les questions politiques, économiques et sociales dans des Partis complètement vidés du vide qui les gangrènent, pourrait alors sortir l’Algérie de la torpeur qui la caractérise depuis l’indépendance confisquée à nos jours. Une réelle Loi sur les Partis devrait voir le jour et ouvrir, dans la toute transparence, la voix aux Algériens qui pourront sortir l’Algérie du « Cinéma » dans lequel l’a plongée sa première Direction Politique. Un « Cinéma » où contrairement à toute éthique, ce sont toujours les bons qui payent et les méchants jouissent de l’impunité.
L’Algérie n’ira nulle part si elle continue à vivre uniquement de son sous sol. Qu’ont-ils de plus que nous les peuples qui ont placé leurs pays au sommet du monde sans ressources naturelles, mais où la seule ressource reste toujours l’Homme, le citoyen.
L’Algérie n’ira nulle part avec des avocats divisés en deux clans : ceux qui connaissent la Loi sont toujours perdants et ceux qui connaissent les juges et les Ministres sont toujours gagnants. Le plus grand perdant est bien entendu la justice. Une justice qui doit commencer dans les familles qui accordent plus de considération aux garçons et du mépris pour les filles.
L’Algérie n’ira nulle part si son nationalisme n’apparaît que s’il est excité à l’occasion d’une coupe du monde ou d’Afrique fut-elle. Le nationalisme doit être pour nous comme l’oxygène sans lequel nous ne pouvons vivre en tant que Nation. Le nationalisme ne doit, en aucun cas, être confondu avec le bruit que fait la jeunesse pour exprimer sa joie. Il doit nous nourrir et nous armer de courage pour ne plus accepter en Algérie la « hogra » dont souffre toute la société, chacun dans son pallier.
Mais l’Algérie ira « In Cha Allah » mieux dans les années à venir, pour peu que les Hommes et les Femmes qui la méritent soient là où les mesures adéquates doivent être prises pour permettre aux Algériennes et aux Algériens de s’exprimer dans la sérénité pour construire ensemble l’Algérie de demain. Mohamed Boudiaf ne nous a-t-il pas dit : « Le Bien est en nous et le Mal est en nous ».
De gr ce, faisons en sorte que l’Algérie de nos enfants et nos petits enfants soit celle du Bien et non celle du mal que nous n’avons cessé de vivre durant toutes ces longues années.
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